Date : 20 12 2000
Source :
http://www.letemps.ch/template/societe.asp?page=8&contenuPage=&article=56662&quickbar=
Le parlement britannique a approuvé
mardi la proposition du gouvernement d'autoriser le clonage
d'embryons humains à des fins thérapeutiques. Après une après-midi
de débats, les parlementaires ont procédé au «vote libre» souhaité
par le gouvernement. Sans consignes de la part des partis, par 366
voix contre 174, ils ont donné le feu vert à un secteur de recherche
très controversé, mais qui ouvre des perspectives médicales et
économiques importantes.
Le 16 août dernier, le gouvernement travailliste de Tony Blair avait
publié un rapport d'experts sur la question (LT du 15 août 2000).
Les spécialistes préconisaient d'autoriser le clonage d'embryons
humains et leur utilisation à des fins de recherche scientifique
durant les quatorze premiers jours de leur développement. Vu le
caractère controversé de la question, le gouvernement avait souhaité
que les parlementaires se prononcent en leur âme et conscience, lors
d'un vote libre. C'est maintenant chose faite.
La loi britannique permet déjà depuis 1990 la création d'embryons
humains clonés pour la recherche, mais uniquement dans le domaine de
la lutte contre la stérilité. Les parlementaires ont accepté hier
d'étendre la portée de ce texte, le Human Fertilisation and
Embryology Act, à tous les domaines de la recherche. La loi ne règle
pas l'éventuelle utilisation du clonage humain dans la pratique
médicale courante. Pour le moment, seule la recherche fondamentale
pourra y recourir.
De nombreux scientifiques sont intervenus pour soutenir le projet.
La British Medical Association (BMA), l'organisation professionnelle
des médecins britanniques, a même écrit à tous les parlementaires
pour les appeler à approuver ce texte. Les partisans de la loi ont
mis en avant les espoirs de traitements par clonage thérapeutique.
Cette technique pourrait soigner certaines affections incurables,
comme les maladies dégénératives du système nerveux (Alzheimer,
Parkinson), ainsi que des lésions irréversibles, comme les brûlures
ou les atteintes de la moelle épinière.
Cet espoir est fondé sur le fait que les cellules de l'embryon ne
sont pas encore différenciées. Elles ont encore la capacité de se
transformer en cellules nerveuses, musculaires, épidermiques, etc.
En les reproduisant en culture, puis en les greffant, il serait
possible de reconstituer toutes sortes de tissus perdus. Le clonage
entre dans ce débat car il permettrait d'obtenir des cellules
embryonnaires génétiquement identiques à celles du patient, de façon
à éviter tout problème de rejet. A partir du matériel génétique
contenu dans n'importe laquelle de ses cellules, on créerait une
série de clones. Après quelques jours, on prélèverait sur ces
embryons – une boule de cellules à ce stade – quelques cellules
indifférenciées. Celles-ci seraient cultivées, puis greffées au
patient pour reconstituer les tissus endommagés.
De nombreuses associations anti-avortement se sont opposées à la
nouvelle loi pour des raisons de respect de la vie. Elles
considèrent l'embryon, même tout au début de son développement,
comme un être à part entière. Les opposants ont aussi exprimé leur
inquiétude face aux dérives possibles du clonage thérapeutique. Ils
craignent que le procédé, initialement développé comme thérapie
cellulaire, ne soit utilisé un jour pour procéder à un «clonage
reproductif», c'est-à-dire pour donner naissance à un être humain
cloné.
Jean-Luc Vonnez |