Source :
http://www.lepoint.fr/economie/document.html?did=128642
Officiellement, les cultures transgéniques sont interdites.
Pourtant, le président autorise la commercialisation de soja
modifié.
Annie Gasnier (à Rio)
Au Brésil, deuxième producteur mondial de soja, les plantations
transgéniques sont interdites. Mais pour combien de temps encore ?
Le compte à rebours semble déclenché, et le président Lula va devoir
trancher entre deux camps adverses représentés par deux de ses
ministres, Roberto Rodrigues à l'Agriculture, favorable aux OGM, et
Marina Silva à l'Environnement, opposée aux productions
transgéniques. Rappelons-le, le Parti des travailleurs (PT),
récemment arrivé aux affaires, dénonçait dans son programme les
cultures transgéniques.
Mais, sous la pression du lobby agricole, Lula a signé une mesure
provisoire qui autorise pour un an la commercialisation de soja
transgénique sur le marché intérieur comme à l'exportation. Au
consommateur de décider, car la présence de ce soja sera signalée
sur les étiquettes.
Le lobby agricole
Le décret contredit une décision de justice datant de 1999, mais
tente de répondre à une situation qui devient incontrôlable dans le
sud du Brésil, où 80 % du soja de l'Etat du Rio Grande do Sul serait
transgénique. Car, faisant fi de la loi, 150 000 producteurs ont
planté des graines transgéniques, faciles à se procurer dans les
pays voisins (Uruguay, Argentine, Paraguay), où les OGM sont
autorisés. Selon les estimations du ministère de l'Agriculture, 10
des 49 millions de tonnes récoltées en cette fin d'été austral, soit
20 % de la production nationale, sont des OGM. Enorme pour un pays
où leur culture est prohibée ! Les quantités sont trop importantes
pour qu'on songe à les incendier sans risquer de mettre en faillite
nombre de fermiers.
Curieusement, le PT - un parti anti-OGM - a dirigé le Rio Grande do
Sul durant quatre ans. C'est là, d'ailleurs, que l'agitateur gaulois
José Bové avait, en janvier 2001, dans le cadre du Forum social
mondial de Porto Alegre, la capitale de l'Etat, participé à
l'arrachage d'OGM sur les terres du groupe américain Monsanto,
fameux fabricant de graines transgéniques.
Au ministère de l'Agriculture, à Brasilia, l'autorisation tout juste
accordée est perçue comme le début de l'ouverture du Brésil aux OGM.
Mais les opposants ne désarment pas : « Le lobby agricole pavoise,
reconnaît l'ingénieur agronome Jean-Marc von der Weid, mais nous
allons demander réparation en justice. » Une bataille qui intéresse
l'Europe, et singulièrement la France : depuis l'interdiction des
farines animales, le soja brésilien est prioritairement servi dans
les étables hexagonales
© le point 04/04/03 - N°1594 - Page 94 - 407 mots
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